Par Jean-François Veilleux, mai 2017

Entre 1834 et 1837, au Bas-Canada, environ 25 000 personnes ont pris part à une multitude d’assemblées patriotiques dont 120 seulement en 1837. En Mauricie et au Centre-du-Québec, des assemblées d’appui aux revendications du Parti patriote ont eu lieu à Bécancour, Berthier, Champlain, Contrecoeur, Deschambault, Maskinongé, Nicolet, Sainte-Geneviève de Batiscan, Trois-Rivières et Yamachiche, mais également aux limites du territoire comme à Berthier, Contrecoeur et Deschambault.

Éléments déclencheurs des rébellions

Depuis 1832, plusieurs causes ont radicalisé les discours et les actions du peuple et des élites patriotes : l’échec du parlementarisme et de la démocratie face à une population laissée à elle-même, l’absence d’institutions municipales et le manque de représentation des autorités en milieu rural, la mauvaise gestion par les autorités de la crise du choléra (6 000 morts en 1832), la surpopulation de quelques seigneuries autour de Montréal puis l’assassinat de civils ainsi que les brutalités lors des élections. De plus, la crise économique et les mauvaises récoltes qui sévissaient depuis quelques temps aigrissent la population et l’indisposent à l’endroit du pouvoir britannique.

Dans la région, au début des années 1830, le juge trifluvien Joseph-Rémi Vallières de Saint-Réal dirigea, avec le député patriote René-Joseph Kimber, un mouvement régional pour la révision du bail des Forges du St-Maurice afin d’ouvrir de nouvelles terres à l’agriculture. Selon l’historien Hervé Biron (1910-1976), c’est autour de Matthew Bell, concessionnaire des Forges du St-Maurice, que se « cristallisa le ressentiment du peuple à l’égard des bureaucrates ». Bell fut dénoncé par la 34e des 92 Résolutions du Parti patriote, adoptées en 1834, pour avoir été « indûment et illégalement favorisé par l’exécutif dans le bail des Forges du St-Maurice ». On lui reprochait d’avoir acquis depuis 1816 de grandes étendues de terre vacantes qui bloquait toute expansion de Trois-Rivières vers l’intérieur du territoire.

Dès le début des hostilités, en novembre 1837, le gouvernement autorise Bell à monter une milice anti-patriote à même ses employés travaillant aux forges. En décembre, il met sur pied deux compagnies de volontaires et nomme son fils Bryan enseigne, et Greive capitaine. Craignant pour la sécurité de M. Bell, le général John Colborne dépêche aussi à Trois-Rivières une centaine de soldats bien armés en janvier 1838.

Bilan national

Lors des différents affrontements contre l’armée britannique, alors l’une des plus puissantes du monde, 158 patriotes ont été tués et 142 blessés contre 22 soldats et miliciens britanniques tués et 43 blessés. Au cours des années 1837 et 1838, en réaction au mouvement insurrectionnel, principalement autour de Montréal, plus de 1 000 patriotes ont été emprisonnés par les autorités, la plupart pour «haute trahison».

La prison de Trois-Rivières jouera un rôle mineur dans l’incarcération des patriotes, mais elle servira de lieu d’incarcération transitoire pour plusieurs d’entre eux dont André-Augustin Papineau, le frère de Louis-Joseph et de Denis Benjamin Papineau.

La prison de Trois-Rivières

D’après des plans de François Baillairgé, architecte de Québec, le centre carcéral de Trois-Rivières, construit dès 1815, entre officiellement en fonction en 1822 pour le rester jusqu’en 1986. Toutefois, la prison trifluvienne joua un rôle mineur dans l’incarcération des patriotes lors des rébellions. La plupart des «prisonniers politiques» locaux furent transférés à la Prison-Neuve de Montréal dite au Pied-du-Courant. Parmi eux, mentionnons le député patriote de Trois-Rivières Edward Barnard, le médecin de Nicolet Joseph-Ovide Rousseau, les deux députés patriotes de Nicolet, Jean-Baptiste Proulx et son beau-frère Jean-Baptiste Hébert. Autre exemple, André-Augustin Papineau, le frère de Louis-Joseph et de Denis-Benjamin Papineau, sera arrêté à Kingsey, détenu à la prison de Trois-Rivières puis emprisonné à celle de Montréal le 2 février 1838. Il sera libéré sans procès lors de l’amnistie générale du 8 juillet 1838.

Les registres de la prison de Trois-Rivières sont malheureusement manquants, disparus ou simplement détruits. Outre celui de 1827, la collection complète des registres débute seulement en 1852. Mais quelques patriotes y ont bel et bien été séquestrés, comme le jeune poète Joseph-Guillaume Barthe, le cultivateur trifluvien Célestin Houde et l’avocat Édouard-Louis Pacaud. Ceux-ci étaient pour la plupart enfermés en attente d’un procès collectif le 13 mars 1839 à Trois-Rivières, un procès qui n’aura finalement jamais lieu.

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