Laura Lafrance, avril 2019

Un sondage Léger réalisé l’an dernier pour l’Institut économique de Montréal (IEDM) indique que « plus de la moitié des Québécois (58 %) sont insatisfaits du système de santé offert par l’État québécois ».

S’il faut prendre avec une certaine réserve les résultats d’un sondage commandée par un think tank de droite qui souhaite une plus grande présence du privé en santé, ces données peuvent sembler alarmantes, considérant que le budget alloué pour les dépenses en santé et en services sociaux a connu une hausse de 5,9 milliards de dollars depuis 2013-2014. En effet, les efforts monétaires du gouvernement québécois ne semblent pas réussir à satisfaire complètement les besoins de la population liés au système de santé.

La méthode LEAN

Or, depuis quelques années, le système de santé québécois applique les principes de la méthode LEAN dans l’optique d’améliorer la qualité de ses services. Concrètement, cette méthode est mise en œuvre dans divers systèmes de santé à travers le monde afin d’augmenter l’efficience et la productivité des centres hospitaliers. Ses principes sont axés sur une diminution du gaspillage des ressources et sur le découpage du processus des soins en plusieurs étapes succinctes. Autrement dit, l’approche LEAN a pour but de rendre les services de santé plus efficaces, tout en minimisant l’usage des ressources monétaires et matérielles.

chaîne de montage LEAN système de santé

La méthode LEAN provient d’une philosophie industrielle conçue par Toyota. Son application dans le système de santé est controversée.
Crédits : Shutterstock

Des origines industrielles

Initialement, la méthode LEAN dérive du système de production du constructeur automobile Toyota. De fait, en 2001, afin de maximiser la qualité de la production de l’entreprise, Toyota a décidé d’établir The Toyota Way, une philosophie qui englobe l’ensemble des principes et des valeurs de la compagnie, notamment « l’amélioration continue » et le « respect ». Le concept de la méthode LEAN provient donc d’une philosophie industrielle.

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Les conséquences d’une telle approche en santé

Pour plusieurs, l’adoption d’une telle méthode de travail dans le système de santé québécois ne serait pas la meilleure option. Bien que cette approche puisse être efficace en milieu industriel, il semblerait qu’elle ne soit pas adéquate dans un domaine comme celui de la santé, où le bien-être des individus est prioritaire. Un article publié par des chercheurs en santé de l’Université de Saskatchewan mentionne « qu’en réalité, il y a une multitude de variables internes et externes qui ont un impact sur le système de santé […] et que l’effet d’une intervention spécifique comme la méthode LEAN est potentiellement minimal. » L’implantation de cette méthode chez nous étant trop récente, les experts peinent à dire s’il réussit réellement à améliorer l’état du système de santé québécois.

De patients à clients

Outre l’incertitude des chercheurs quant à l’efficacité réelle de cette approche, plusieurs  remettent en question le manque d’humanité du concept LEAN. Étienne Boudou-Laforce, rédacteur au Huffington Post Québec, indique que « si la méthode LEAN peut s’appliquer sur une ligne de montage, dans la conception d’une automobile, elle n’a que peu de raison d’être dans le réseau de la santé, alors que l’on s’attarde directement à des êtres de chair et de sang, de conscience et de sensibilité ». De même, pour de nombreux Québécois et Québécoises, la chaleur humaine et la compassion, valeurs qui manqueraient apparemment à la méthode LEAN, devraient passer avant l’accroissement de la productivité.

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